La tétine perturbe l’allaitement

Article Info/Intox
La « sucette » est scrutée avec méfiance, soupçonnée de détourner le bébé du sein. D’après les études scientifiques menées sur le sujet, ces craintes sont-elles justifiées ?

En an­glais, elle est appelée « pacifier », un nom qui lui convient fort bien ! De fait, les pa­rents de bé­bés savent que la té­tine apaise bien de grosses co­lères comme des pe­tites contra­rié­tés. Mais de­puis cinq ans en­vi­ron, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui plé­bis­cite à juste titre l’al­lai­te­ment ma­ter­nel pour ses mul­tiples bien­faits maintes fois démontrés, a cette tétine dans le col­li­ma­teur. Elle re­com­mande en particulier d’at­ti­rer l’at­ten­tion des mères sur les pos­sibles in­ter­fé­rences entre le pe­tit bout de ca­ou­tchouc ou de si­li­cone et l’en­vie de té­ter. Le soup­çon étant que la prise de ce té­ton de sub­sti­tu­tion puisse di­mi­nuer la sti­mu­la­tion exer­cée sur le sein et contri­buer à ré­duire la sé­cré­tion de lait, ac­cé­lé­rant ainsi in­vo­lon­tai­re­ment le se­vrage. 

Des études à l’attaque d’un mythe

Pour sa­voir si ces craintes étaient fondées, des pé­diatres fin­lan­dais ont souhaiter réaliser un bilan extrêmement complet de ces connaissances au niveau international. Pour cela, ils se sont lan­cés dans une re­vue sys­té­ma­tique de la lit­té­ra­ture scientifique por­tant sur quatre grandes bases de don­nées et  dix études, cinq concer­nant des en­fants à terme et les cinq autres des pré­ma­tu­rés. Dans celles-ci, cer­tains groupes de bé­bés étaient pri­vés de « su­cette » tan­dis que d’autres y avaient ac­cès li­bre­ment. Les au­teurs, qui ont pu­blié dans l’Eu­ro­pean Jour­nal of Pe­dia­trics le 14 juillet 2022, ont ana­lysé les taux d’al­lai­te­ment à 2, 3, 4 et 6 mois. Ré­sul­tats : à 2 mois, le taux d’al­lai­te­ment était si­mi­laire chez les bé­bés avec et sans « sucette » (les conclu­sions por­tant sur trois études in­cluant 1 862 bé­bés à terme). Pas de dif­fé­rence non plus à 3 mois (après exa­men de trois études concer­nant 1 621 nour­ris­sons et deux autres sur 1 338 bé­bés). À 4 mois, il a été mon­tré que res­treindre l’uti­li­sa­tion de la té­tine n’amé­lio­rait pas le taux d’al­lai­te­ment. Au­cune dif­fé­rence si­gni­fi­ca­tive n’a non plus été re­le­vée à 6 mois. D’après les études, il apparaît que l’utilisation de la tétine chez le bébé ne réduit pas la durée de l’allaitement et éviter l’usage de cet accessoire ne permet pas non plus de prolonger l’allaitement.

Et quel effet sur les prématurés ?

Les bébés nés prématurément ont à la fois des besoins et des risques particuliers. Concernant cette catégorie particulière de petits patients, les pé­diatres ont éplu­ché quatre études im­pli­quant 283 bé­bés pour voir si le fait d’avoir ac­cès à une té­tine avait une ré­per­cus­sion sur la du­rée d’hos­pi­ta­li­sa­tion. Leur ré­ponse est oui ! D’après les experts, cela permettrait même un rac­cour­cis­se­ment du sé­jour dans le service de 7 jours. Les au­teurs ont également es­timé que l’uti­li­sa­tion de la « su­cette » ré­dui­sait de 3 jours le temps de tran­si­tion entre le ga­vage (c’est à dire l’alimentation par l’intermédiaire d’une sonde) et l’ali­men­ta­tion orale com­plète. 

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