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Cosmétiques faits-maison : prudence

Illustration - Cosmétiques faits-maison : prudence

Adobe Stock - Par marrakeshh

Des spécialistes en cosmétologie alertent sur le danger potentiel des produits cosmétiques faits maison.

Céline Couteau et la professeure Laurence Coiffard sont docteures en pharmacie et travaillent toutes deux au sein du laboratoire de pharmacie industrielle et de cosmétologie de l’Université de Nantes. Ces expertes sont particulièrement actives dans la vulgarisation scientifique : leur site internet « Regard sur les cosmétiques » très régulièrement mis à jour, est une source d’information indépendante. Il leur permet de signaler au grand public les produits ou gammes qu’elles jugent remarquables, mais aussi de pousser régulièrement quelques « coups de gueule ».

Si ces deux spécialistes sont, à juste titre, critiques à propos de certains ingrédients utilisés dans telle crème hydratante ou pointent du doigt les arguments marketing qu’elles jugent douteux, la mode des produits faits maison ne les laisse pas non plus de marbre. « Depuis quelques années déjà, les cosmétiques dits "maison" attirent certaines d'entre nous », écrivent-elles. « Ils présentent pourtant de nombreux inconvénients ! » Et de lister « des formules qui sortent d’on ne sait où, inventées par on ne sait qui », « des fournisseurs de matières premières très peu fiables », « une efficacité douteuse », « une conservation aléatoire »… Bref, elles ne voient pas ce type de produits d’un très bon œil.

Une envie de plus de naturel

On comprend pourtant facilement ce qui pousse des néophytes à se lancer dans la confection de shampooings, dentifrices, baumes hydratants… dans leur cuisine : la recherche de naturalité. L’envie de réaliser soi-même des produits sans conservateurs, sans colorants, sans emballage aussi parfois. Bref, une volonté de maîtriser la qualité de ces produits que l’on utilise au quotidien.
Ce marché connait un fort développement depuis plusieurs années : de nombreuses marques proposent donc des huiles végétales, des beurres végétaux, des eaux florales, des huiles essentielles mais aussi des bases de soin ou des bases lavantes, des poudres colorantes… à associer pour confectionner le produit de son choix. Toutes ces matières premières sont disponibles en magasins bio, notamment, mais aussi dans certaines pharmacies, qui proposent parfois également des produits en vrac.

Une qualité qui questionne

Les deux pharmaciennes s’inquiètent particulièrement de la qualité des matières premières. Celle-ci ne peut pas toujours être vérifiée, faute de compte-rendu d’analyse ou de fiche qualité. A supposer, d’ailleurs, que l’utilisateur sache quels points vérifier sur de tels documents pour être certain de disposer d’un composant adapté à l’utilisation qu’il souhaite en faire.

Par ailleurs, les adeptes du DIY (Do It Yourself, c’est-à-dire « Faites-le vous-même») ne sont généralement pas des spécialistes en chimie ou en formulation cosmétique. Seule une minorité a les compétences nécessaires pour cela. Alors qu’elles suggèrent des « recettes », les personnes qui tiennent des blogs et autres chaînes YouTube consacrés à la dermocosmétique faite maison peuvent donc induire en erreur les personnes qui suivent leurs conseils. On se souviendra, par exemple, du conseil d’EnjoyPhoenix, une YouTubeuse star, qui avait suggéré à ses followers d’utiliser de la poudre de cannelle en masque sur le visage : une pratique dangereuse puisque la cannelle est caustique pour la peau et allergisante. Même problématique avec les crèmes hydratantes incluant des essences d’agrumes, pourtant photosensibilisantes.

L’argument d’une meilleure efficacité des produits « maison » par rapport à leur version industrielle n’est pas non plus pertinent. Ainsi, les chercheuses ont récemment évalué des recettes permettant de fabriquer des crèmes solaires. Leur conclusion est édifiante, comme elles l’ont expliqué  dans Ouest France : « Trois des 15 recettes étudiées ne contiennent aucun écran solaire et constituent donc un risque majeur pour les utilisateurs en cas d'exposition au soleil ». De plus, « les 12 autres ne peuvent pas être considérées comme des produits de protection solaire puisqu'elles ont tous un SPF inférieur à 6, la valeur seuil exigée en Europe ». Bref, une tromperie qui n’est pas sans conséquences sur la santé des utilisateurs.

Pour les expertes, ce sont autant de bonnes raisons de « confier sa peau à des "valeurs sûres" de l'industrie », d’autant que de nombreux laboratoires proposent à présent des gammes respectueuses de l’environnement, composées d’ingrédients soigneusement sélectionnés et pauvres en conservateurs.

 

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