Pour la première fois depuis que les pénuries de médicaments sont comptabilisées, leur volume s’est réduit en 2024, passant de 4 925 à 3 825 en un an. Ce recul de 1100 déclarations (obligatoires) de la part des laboratoires à l’agence du médicament (ANSM) couvre autant les « risques de ruptures » que les « ruptures ». Il ne s’agit donc pas uniquement des pénuries constatées. En effet, tout fabricant de médicament est tenu d'alerter les autorités sanitaires lorsqu’un médicament pourrait venir à manquer, de façon à mettre en place, dans la mesure du possible, des dispositifs pour limiter ce risque.
Une situation qui demeure grave
Malgré cette nette amélioration, le président du principal syndicat de pharmaciens (FSPF) Philippe Besset ne se montre pas totalement serein. « C’est exact, il y a un peu moins de ruptures qu’en 2023 – qui a été l’année la plus horrible – et elles concernent moins de gens car les problèmes que nous avons eus avec des médicaments très utilisés comme la prednisone et les antibiotiques majeurs ont été réglés. En revanche, elles sont plus graves : une rupture sur un antipsychotique, c’est un problème majeur de santé publique. »
Sentiment d’insécurité
C’est le message que le représentant des titulaires d'officines a fait passer lors d’une réunion initiée par les ministères de la Santé et de l’Industrie sur un point d’étape un an après la mise en place de la "feuille de route 2024-2027 pour lutter contre les pénuries de médicaments". L’occasion de rappeler les trois revendications de sa profession : une entrée en vigueur plus rapide des solutions identifiées en cas de pénurie avérée ; une gestion fine des ruptures non seulement au niveau national mais aussi territoire par territoire ; le remboursement des tests Covid (qui ne le sont plus depuis le 1er mars 2025) élargi au dépistage de la grippe et de la bronchiolite, permettant d’éviter l’usage d’antibiotiques lorsque l’infection est virale.
En attendant un retour des pouvoirs publics sur ces différents points, le temps passé à résoudre le casse-tête des ruptures au comptoir est toujours plus important. Une enquête annuelle menée par le Groupement pharmaceutique de l’Union européenne (GPUE) a dévoilé fin janvier que les pharmaciens des 28 pays du continent participants passaient désormais en moyenne plus de 10 h 30 par semaine à gérer les pénuries, soit 4 heures de plus qu’en 2019. En sus d’être chronophage, les pharmaciens estiment que ce fléau entraîne une surcharge administrative ainsi qu’une perte de confiance de la part des patients qui, pour certains, peuvent devenir agressifs voire violents, ce qui génère un sentiment d’insécurité au sein des équipes officinales.