Plusieurs mesures ont été mises en place ces derniers mois pour pallier les ruptures de médicaments psychotropes, c’est-à-dire de molécules agissant sur les mécanismes neurobiologiques du cerveau et conçues pour améliorer les perturbations psychiques. Si une meilleure disponibilité pour certains de ces médicaments est notée, « l’état des approvisionnements reste fragile », a indiqué l’Agence du médicament (ANSM) le 10 juillet dans un point de situation. Cet état des lieux intervenait après une réunion rassemblant les représentants des professionnels de santé, des patients et des acteurs de la chaîne du médicament.
Tensions persistantes
Les médicaments psychotropes ont pour caractéristique d’agir sur le système nerveux central. En modifiant certains processus cérébraux, ils permettent de traiter des troubles psychiques banals ou graves. Ils se répartissent en plusieurs classes : les hypnotiques (ou somnifères), les anxiolytiques (ou tranquillisants), les antidépresseurs, les neuroleptiques, les thymorégulateurs (ou régulateurs de l’humeur), et les psychostimulants.
Certains de ces médicaments psychotropes font l’objet de difficultés d’approvisionnement particulièrement lourdes depuis plusieurs mois. Il s’agit en particulier des antidépresseurs à base de venlafaxine (Effexor et génériques) et de setraline (Zoloft et génériques) ainsi que des antipsychotiques à base de quétiapine (Xeroquel LP et génériques), de carbonate de lithium (Teralithe), et d’olanzapine injectable (Zypadhera).
Les causes de ces multiples tensions en approvisionnement sont diverses : arrêt partiel de l’activité de l’usine Pharmathen International qui fournit habituellement 60% des médicaments à base de quétiapine, non-conformité de la matière première ou défauts de qualité de produits finis, retards d’approvisionnements, hausse de la demande, etc.
Solutions tous azimuts
Dans son point de situation, l’ANSM relève que de nombreux dispositifs ont été activés pour faire face aux tensions sur les approvisionnements : mobilisation des stocks de sécurité, arrêts des exportations, mobilisation des laboratoires non défaillants, importations de stocks, surveillance des ventes directes, préparations magistrales par les pharmaciens lorsque cela est possible, distribution plafonnée, recommandations auprès des professionnels de santé de ne pas débuter de nouveaux traitements avec ces molécules pour les réserver aux patients en bénéficiant jusque-là, voire recherches d’alternatives thérapeutiques possibles, dispensation à l’unité, et consignes sur la conduite à tenir pour les patients. L’ANSM précise qu’entre la date de remise à disposition déclarée par les laboratoires et la disponibilité en pharmacie pour les patients, il existe un délai incompressible de 3 à 4 semaines.
Quétiapine en difficulté
La spécialité pour laquelle l’amélioration est la plus marquée est la quétiapine, indiquée dans le traitement de la schizophrénie, des troubles bipolaires et de la dépression majeure. Elle était prescrite en 2024, à 240 000 patients français.
La distribution des dosages à 25 mg et 50 mg, ainsi que 50 mg en libération prolongée (LP), est désormais à nouveau assurée même si les patients « peuvent encore rencontrer des difficultés pour trouver leur traitement », indique l’instance sanitaire. La date de remise à disposition des dosages à 300 mg et 400 mg (LP) reste en revanche encore inconnue.
Lithium et olanzapine
Le carbonate de lithium est indiqué en prévention des rechutes des troubles bipolaires et des états schizo-affectifs intermittents, et en traitement curatif des états d'excitation maniaque ou hypomaniaque. Il est le traitement de 90 000 patients français. Les dosages à 250 mg en libération immédiate (LI) et 450 mg (LP) sont indiqués comme ayant été remis à disposition en juin.
« La situation est en train de revenir progressivement à la normale », les stocks « étant en cours de reconstitution », note l’ANSM. Des difficultés d’approvisionnement persistent toutefois dans les pharmacies de ville. Les médecins sont priés depuis plusieurs semaines de privilégier les formes à libération immédiate lorsqu’il s’agit de débuter un traitement chez un patient.
La spécialité à base d’olanzapine est un médicament injectable, qui a une durée d’action de 6 à 8 mois après la dernière injection. Elle est administrée à l’hôpital à 3 000 patients.
Le laboratoire Cheplapharm sera en mesure de commencer à remettre à disposition le médicament seulement à partir du mois de septembre 2025. De façon transitoire et exceptionnelle, des importations de ce médicament sont réalisées depuis le mois de juin, afin d’assurer les besoins des patients en France. Il est demandé aux médecins de ne plus débuter de traitement avec l’olanzapine injectable, afin de permettre aux patients en cours de traitement de continuer à y accéder. Lorsque cela est possible pour certains patients en cours de traitement, les médecins pourront modifier le traitement et privilégier l’olanzapine orale, ou un autre antipsychotique lorsqu’une forme à libération prolongée leur est indispensable. En cas de changement de traitement, les patients doivent signaler à leur médecin tout effet indésirable ou symptôme inhabituel, ou s’ils ont l’impression que le traitement n’agit pas comme d’habitude.
Sertraline et venlafaxine
L’approvisionnement de la spécialité venlafaxine (dosages à 37,5 mg et 70 mg LP), nécessaire au traitement de 960 000 patients, devrait s’améliorer en ville « en comparaison des semaines précédentes », souligne l’ANSM. La situation reste toutefois tendue et les prochains approvisionnements par les industriels « incertains ». Des pistes d'importation seront mises en œuvre à partir d'août 2025.
S’agissant de l’approvisionnement des médicaments à base de setraline (dosages à 25 mg et 50 mg LI), qui ont vu la demande bondir (+125% depuis 2019), nécessaires à 800 000 patients, le laboratoire indique le mois de juin comme date de remise à disposition. La distribution aux pharmacies de ville reste limitée afin d’assurer une distribution continue et équitable des stocks. Depuis le mois de mai, les pharmaciens sont autorisés à dispenser une préparation magistrale, prises en charge par l’Assurance maladie, en alternative à ce traitement.