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Lutte contre le VIH : où en sommes-nous ?

Lutte contre le VIH : où en sommes-nous ?
Défi pour le monde médical, le VIH reste une maladie incurable. De nombreuses voies de recherche sophistiquées sont actuellement explorées pour le prévenir et le guérir.

Découvert il y a 40 ans, le virus de l’immunodéficience humaine, ou VIH, continue de tuer. Le programme commun des Nations unies sur ce sujet, appelé Onusida, estime qu’en 2022, 39 millions de personnes dans le monde vivaient avec le VIH et que 630 000 en sont mortes. Dans l’Hexagone, en 2021, Santé publique France avance qu’environ 5 000 personnes ont été contaminées par le virus. Mais si le VIH n’a pas encore été vaincu, les quarante dernières années ont permis de mieux faire face au virus, et la recherche continue avec l’espoir de voir arriver un vaccin ou un remède.

En première ligne des avancées de ce combat se positionne la thérapie antirétrovirale, seul traitement efficace à ce jour. « Elle cible plusieurs enzymes virales clés du cycle de réplication du virus [ce qui est son mode de reproduction dans le corps] », souligne Caroline Charre, biologiste médicale spécialisée en virologie à l’AP-HP. Arrivée en France au cours de l’année 1996, la trithérapie a révolutionné la lutte contre le VIH. La combinaison de plusieurs molécules antirétrovirales, appelée multithérapie, a sauvé plusieurs millions de personnes dans le monde. « À l’origine, il s’agissait de trithérapie, mais avec le temps, les associations ont évolué, note Caroline Charre. Aujourd’hui, beaucoup de bithérapies, aussi efficaces que les formules avec trois molécules, sont utilisées. En France, on peut citer par exemple la combinaison des deux antirétroviraux, lamivudine + dolutégravir. Par ailleurs, deux nouvelles spécialités injectables à libération prolongée associent du cabotégravir et de la rilpivirine. »

 

Des stratégies efficaces

Si la thérapie antirétrovirale est efficace pour contrôler la réplication du virus, elle ne l’élimine pas pour autant du corps du patient, ce qui oblige ce dernier à prendre à vie son traitement et à en supporter les potentiels effets indésirables. C’est pourquoi la recherche continue à explorer toutes les pistes possibles. « Au-delà de la thérapie antirétrovirale, il existe d’autres voies de stratégies thérapeutiques visant à booster l’immunité, comme les bNAbs (anticorps neutralisants à large spectre) ou les cellules CAR-T », indique la chercheuse. Une autre façon de se mettre en chasse d’une solution pour traiter et guérir l’infection par le VIH repose sur l’analyse des très rares cas de patients ayant guéri de cette infection. On parle ainsi du patient de Londres, de Berlin, de Düsseldorf… Ils étaient seulement cinq dans le monde jusqu’à récemment. « Cet été, on a parlé du sixième patient en rémission après une greffe de cellules souches hématopoïétiques, détaille Caroline Charre. Différente des cinq autres, la rémission de ce patient de Genève n’est pas liée à un mécanisme qui aurait été observé précédemment. » Cette guérison offre ainsi un nouvel axe de recherche, même si la rémission obtenue par greffe de cellules souches hématopoïétiques n’est pas envisageable pour des soins en population générale. « Le bénéfice/risque ne justifie pas d’utiliser cette méthode, affirme la chercheuse. Même pour ces six patients, le VIH n’a en aucun cas été la justification de ces greffes. » Une autre approche prometteuse repose sur l’étude de patients dits « contrôleurs naturels ». Il s’agit de personnes dont on a pu montrer qu’« ils contrôlent naturellement la réplication virale, soit grâce à une modification d’un de leurs gènes appelé CCR5, qui rend plus difficile l’accès aux cellules par le VIH, soit par des modulations épigénétiques qui limitent la transcription des provirus, ou encore par des réponses immunitaires particulièrement efficaces », poursuit Caroline Charre. Si les recherches permettaient de trouver un moyen de mimer ces mécanismes, des solutions thérapeutiques pourraient émerger.

 

Anticorps et vaccins

Les vaccins sont une autre voie. Si, actuellement, aucun essai réellement prometteur n’a encore vu le jour, une approche reposant sur l’utilisation d’anticorps neutralisants à large spectre pourrait bien changer la donne. « Comme dans le cas du SARS-CoV-2 ou de la grippe, le VIH possède une diversité de souches importante, note Jean-Daniel Lelièvre, directeur du département d’immunologie clinique et maladies infectieuses de l’hôpital Henri-Mondor (Créteil) et responsable de la recherche clinique au Vaccine Research Institute. Si la plupart des personnes produisent un anticorps efficace contre une des souches de ce virus, on s’est rendu compte que certains induisent des anticorps neutralisant 90 à 95 % d’entre elles. » Ses travaux visent donc à reproduire ce type de réponse par le biais d’un vaccin. Les premiers aspects fondamentaux de cette approche commencent à être compris mais les résultats sont encore loin. « Personne n’imagine avoir un vaccin diffusable à la population générale avant au moins dix ou quinze ans, si jamais on en a un », explique-t-il. Au-delà des vaccins agissant en prévention, leurs variantes thérapeutiques – c’est-à-dire qui guérissent – auront peut-être également un rôle à jouer à l’avenir dans la lutte contre le VIH.

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