Passé un certain âge, les lunettes deviennent un incontournable compagnon de lecture, que ce soit pour prendre connaissance de ses SMS ou parcourir son journal. Pas si sûr… du moins à en croire la promesse du laboratoire californien Lenz Therapeutics. Son collyre, baptisé Vizz, vient d’obtenir l’approbation de l’administration américaine chargé de la surveillance des médicaments et des denrées alimentaires, la Food and Drug Administration (FDA). Ainsi, une petite goutte dans chaque œil permettrait de corriger temporairement la presbytie.
Ce processus normal lié au vieillissement, qui apparaît vers 45 ans et parfois même un peu avant, se caractérise par la diminution du pouvoir accommodatif du cristallin, c’est-à-dire la capacité de passer de la vison de loin à la vision de près tout en conservant une image nette. Avec le temps, le cristallin devient plus rigide, s’épaissit et perd de son élasticité.
Augmenter la profondeur de champ
Pour pallier ce défaut d’accommodation en vision de près, le collyre californien promet de stimuler faiblement le muscle ciliaire pour contracter le sphincter de l’iris et provoquer ainsi un effet dit « sténopeïque ». Plus simplement, après instillation des gouttes, le diamètre de la pupille se réduit à moins de 2 mm, augmentant la profondeur de champ et améliorant la vision de près, mais sans pour autant provoquer de décalage myopique qui affecterait la vision de loin.
La molécule qui permet cette prouesse est l’acéclidine. Vizz n’est pourtant pas le premier collyre visant à corriger transitoirement la presbytie : le produit de Lenz Therapeutics arrive en effet après Vuity (Abbvie)et Qlosi (Allergan), tous deux commercialisés aux États-Unis, respectivement depuis 2021 et 2023. Mais alors que ces derniers sont formulés à base de pilocarpine, une molécule ayant le même mode d’action, l’acéclidine promet une action plus sélective et entraînant moins d’effets indésirables.
Pas de miracle en vue toutefois
Les données issues des trois essais cliniques menés avec Vizz montrent une amélioration de la vision de près en l’espace de 30 minutes et pouvant se prolonger jusqu’à 10 heures. Et ce, avec des effets indésirables relevés qui ont été qualifiés de bénins et transitoires. Mais avant que les presbytes ne jettent leurs binocles par-dessus les moulins, il faut tout de même préciser que tout le monde ne sera pas forcément éligible à l’emploi de ce collyre, notamment en raison d’une physiologie et d’un dynamisme pupillaire différents selon les individus. Par ailleurs, la tolérance au long cours de la surface oculaire à ce produit demeure encore inconnue, et l’effet myotique, c’est-à-dire la contraction de la pupille, reste une contre-indication à la conduite d’un véhicule, surtout de nuit. Autant de facteurs qui laissent à penser que nos bonnes vieilles lunettes ont encore de beaux jours devant elles !