Tous les 8 ans depuis 1981, le Secteur français des aliments de l’enfance (SFAE) mène l’étude Nutri-Bébé, qui apporte une photographie fine et unique des pratiques et consommations alimentaires des enfants de moins de 3 ans en France, et en observe les évolutions. Cette 6e édition révèle que malgré la pertinence des recommandations officielles et le travail de terrain effectué par les pédiatres et les professionnels de santé, notamment les pharmaciens, il subsiste un écart entre les recommandations officielles sur l’alimentation des tout-petits et les pratiques réelles des parents.
Un taux d’allaitement en baisse
Premier phénomène observé, la baisse du taux d’allaitement, qui est passé de 62 % en 2013 à 55 % en 2022, et ce malgré les recommandations de l’OMS en faveur de cette pratique et les nombreuses études qui valident scientifiquement ses bienfaits. Pour autant, si elles sont moins nombreuses globalement, les mères qui ont choisi de donner le sein ont poursuivi leur allaitement plus longtemps, en partie grâce au télétravail qui a souvent permis d’éviter un arrêt brutal de l’allaitement lors de la reprise du travail. Pour celles qui y ont renoncé dès le début, une des raisons avancées dans l’étude est elle aussi en lien avec la crise sanitaire, mais cette fois-ci de manière négative. Pour certaines mères en effet, la Covid a rimé avec une sortie prématurée de la maternité et donc un moins bon accompagnement du démarrage de l’allaitement en maternité. Son abandon dès le retour à la maison s’explique donc par un manque de soutien.
Veiller à ne pas supprimer les lipides
L’étude montre aussi que 12 % des parents excluent certains aliments de leur propre alimentation, et que 60 % d’entre eux suppriment aussi ces aliments de la diète de leur enfant. En particulier le « gras ». Ainsi, comme cela avait déjà été constaté en 2013, il semblerait qu’un certain nombre de tout-petits ne consomment pas assez de lipides. Pourtant, ils sont un allié indispensable pour le développement des bébés, notamment de leur cerveau. Il est donc primordial de veiller à ce que les apports en acides gras essentiels, omégas 3 et omégas 6, soient suffisants, notamment en ajoutant dans les purées maison un peu d’huiles végétales ou de beurre.
Attention au lait de vache donné trop tôt
Autre élément marquant, l’introduction trop précoce du lait de vache dans l’alimentation des jeunes enfants. Un quart des nourrissons âgés de 1 à 2 ans consomment en effet déjà du lait de vache, puis 1 sur 2 passé l’âge de 2 ans. Pourtant, les recommandations sont claires : compte tenu des besoins en nutriments des jeunes enfants, notamment en fer, « le lait infantile doit être maintenu jusqu’à l’âge de 3 ans », insiste le Dr Sandra Brancato, l’une des pédiatres du comité d’experts de l’étude. En effet, le lait spécialement formulé pour cette tranche d’âge a une composition spécifique, notamment pour lutter contre l’anémie. Un autre membre du comité, Amandine Rochedy, sociologue à l’Université de Toulouse Jean-Jaurès, met en garde contre une attitude répandue qui consiste à strictement respecter les recommandations nutritionnelles chez les nourrissons de moins d’1 an, puis de considérer à tort que dès qu’il a soufflé sa première bougie, le bébé est un adulte en miniature.
Sur ce versant éducatif, le pharmacien a un rôle essentiel à jouer. En effet, le passage régulier des jeunes parents dans les pharmacies est l’occasion de faire le point sur les recommandations, notamment pour choisir le lait le plus adapté. Toutes les questions sont pertinentes et il ne faut pas hésiter à les poser à l’équipe ! En parallèle, le pédiatre a lui aussi bien évidemment un rôle essentiel à jouer pour expliquer aux parents l’importance de poursuivre le lait 3e âge ou lait de croissance jusqu’à 3 ans.
