En France, les cas d’encéphalites à tiques sont encore peu nombreux (une trentaine par an). La maladie sévit beaucoup plus en Europe de l’Est, ainsi qu’au nord du Japon et de la Chine. Mais l’extension de la zone d’infestation dans l’Hexagone suscite la préoccupation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses), inquiétude qu’elle a manifesté dans une publication officielle en début d'été.
Les tiques, vecteurs le plus fréquent
L’encéphalite à tiques est causée par un virus (tick-borne encephalitis virus, TBEV) transmis par la piqûre de certaines tiques infectées. L’espèce de tiques Ixodes Ricinus, la plus répandue et la plus fréquemment trouvée sur les êtres humains, est aujourd’hui impliquée dans la majorité des cas de transmissions à l’homme en Europe. Elle est donc considérée comme le principal vecteur de la pathologie.
La gravité d’une encéphalite à tique est variable chez l’être humain, elle va d’une fièvre bénigne à des complications neurologiques graves. Dans 70 à 90% des cas, les personnes mordues et infectées seront asymptomatiques. Les personnes chez lesquelles la maladie se déclare développent des symptômes pseudo-grippaux (fièvre, maux de tête, frissons), qui apparaissent brutalement après une incubation d’une à deux semaines. C’est seulement chez 20 à 30% de ces malades que peuvent ensuite apparaître des symptômes plus graves, dus à une atteinte du cerveau (encéphalite) : un état d’abattement profond (prostration), une agitation, une somnolence, un délire, des troubles du tonus des muscles, une perte d’équilibre. Dans 10 à 20% de cas on recense 2 à 3% de décès ou de séquelles à long terme (paralysie, perte d’autonomie).
Contamination alimentaire
Jusqu’à présent, dans l’Hexagone, le virus était surtout présent en Alsace. La probabilité de développer les symptômes d’une encéphalite à tiques y est élevée surtout chez les forestiers et les éleveurs. Ils sont treize fois plus à risque que le reste de la population générale, pour laquelle la probabilité de contracter l’infection reste faible. Mais l’Anses se montre préoccupée que le virus étende sa zone de circulation, avec des cas signalés en dehors de la région historiquement la plus concernée. De plus, le nombre de cas est en augmentation partout, en France, comme en Europe.
En outre, un nouveau mode de transmission du TBEV, jusque-là non rapporté en France, a été mis en évidence récemment, en 2020 dans l’Ain, département où la circulation du virus n’était pas connue. Il s’agit d’une transmission alimentaire, via la consommation de lait cru et de fromages au lait cru de chèvres ayant accès à la végétation dans des zones où le virus circule. La piqûre de chèvres par des tiques porteuses du virus peut donc contaminer leur lait. Ce type de transmission est désormais responsable de plusieurs cas d’encéphalite par an. La région Rhône-Alpes est la plus concernée par ce risque, en raison du nombre élevé d’élevage de chèvres, et de la circulation avérée du virus.
Mieux connaître le virus
C’est ce nouveau mode de contamination, conjugué à une augmentation des cas et à une extension géographique - aux raisons encore mal connues et probablement multiples -, qui ont conduit l’Anses à émettre une série de recommandations. Afin de renforcer la surveillance de la maladie, elle appelle à mener des recherches sur les zones à risques, les autres espèces animales (vaches et chevreuils), les facteurs de transmission, et les outils de détection du virus. Elle préconise également de limiter l’exposition des chèvres produisant du lait, via l’installation de clôtures les empêchant d’accéder aux zones boisées, et de pasteuriser le lait dans les cas d’urgence (virus détecté dans le lait collecté). Elle conseille aussi de mieux informer la population générale, les travailleurs exposés et les professionnels de santé sur cette maladie peu connue, afin d’en améliorer la prévention.
Prévenir plutôt que guérir
Il n’existe aucun traitement viral contre le TBEV. Il est seulement possible d’en soulager les symptômes, et de prendre en charge les séquelles de façon pluridisciplinaire, notamment par de la rééducation. Il existe un vaccin (Encepur ou Ticovac), recommandé pour le moment uniquement pour les voyageurs séjournant entre le printemps et l’automne dans des zones rurales ou forestières dans lesquelles la maladie est endémique (Europe centrale, Europe de l’Est, Europe du Nord, Nord de la Chine, Corée du Sud, Japon, Kirghizstan, Mongolie, Russie orientale). La vaccination doit toujours être complétée par des mesures individuelles de protection contre les piqûres de tiques (port de vêtements longs et couvrants, inspection de toutes les parties du corps en retour de balade).